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par Eric Müller

Ce qu’on vous vend sous le nom « vinaigre balsamique » n’est qu’un mélange vinaigre de vin + additif goût caramel.

Ce vinaigre de vin « goût balsamique » est fabriqué à la va-vite (moins de 24h), alors que le véritable vinaigre balsamique nécessite des dizaines d’années de maturation !

Au cours de mes recherches, j’ai fait des découvertes intéressantes sur la fabrication du vinaigre. C’est très instructif pour comprendre ce que l’on vous vend.

Ce que vous devez savoir sur le vinaigre vendu en grandes surfaces

Tous les vinaigres sont faits à la va-vite :

  • le vinaigre de vin,
  • le vinaigre balsamique,
  • le vinaigre de cidre de pomme,
  • le vinaigre de malt
  • etc…

… s’il n’est pas précisé qu’il a été fabriqué de façon artisanale, c’est qu’on vous a vendu un vinaigre fait à la va-vite, et qui ne possède pas les incroyables propriétés du vinaigre traditionnel [1].

Qu’il soit artisanal ou industriel, le vinaigre est fermenté (c’est déjà ça). Seulement, la fermentation est un processus très lent. Pour fabriquer du vinaigre à l’ancienne, il faut patienter 1 mois minimum… et jusqu’à 25 ans, pour les plus vieux vinaigres !

Croyant bien faire, des industriels ingénieux ont conçu deux techniques pour accélérer la fermentation du vinaigre, et faire du vinaigre en 24 heures – plutôt qu’en 744 heures (1 mois). Je vais vous présenter ces techniques dans un instant. Mais voici ce que vous devez savoir :

Comme pour le vin, il n’est pas possible d’accélérer le temps. Les industriels ne peuvent pas faire du vinaigre en 24 heures et espérer qu’il aura le même goût (et les mêmes propriétés) qu’un vinaigre vieux de 25 ans !

Le vinaigre industriel est chimiquement « mort »

Les industriels peuvent rééduquer les populations (surtout les jeunes générations) pour leur faire consommer du vinaigre de mauvaise qualité, et leur faire oublier ce qu’était le vinaigre d’antan !

C’est ce qui s’est passé avec nos fruits, nos légumes, nos céréales, nos viandes…

Ils ont perdu non seulement le goût d’antan, mais aussi perdu les valeurs nutritives d’antan.

Saviez-vous qu’une pomme moderne contient 1% des valeurs nutritives d’une pomme de 1950 [2] ?

Et qu’une orange moderne contient à peine 4,7% des valeurs nutritives d’une orange de 1950 ?

Il faut s’imaginer que c’est le même problème avec le vinaigre industriel.

Pour moi, c’est le drame de la modernité.

Avant de vous montrer la méthode industrielle, je vais vous expliquer comment faire votre vinaigre à l’ancienne à la maison.

Comment faire du vinaigre à l’ancienne à la maison

Prenez une bouteille de vin rouge sec ou de vin blanc sec.

Choisissez un vin :

  • jeune
  • de qualité (pas de la piquette !)
  • pas bouchonné
  • si possible, sans additifs, ni conservateurs
  • idéalement avec une teneur en alcool inférieure à 10°

Ensuite, procurez-vous un récipient aussi opaque que possible en céramique, en verre, ou en bois (comme un petit tonneau en chêne). L’idéal est d’avoir un petit robinet qui permettra ensuite de soutirer facilement du vinaigre. Évitez les récipients métalliques.

Versez le vin dans le récipient et recouvrez d’un linge. Le linge permet de laisser passer l’air et d’éviter que les mouches drosophiles ne rappliquent.

À présent, trouvez un emplacement secaérésombre, offrant une température entre 20 et 30°C.

Prévoyez de laisser votre récipient à cet endroit :

  • au moins 2 semaines si la température s’approche des 30°C (typiquement l’été)
  • au moins 2 mois si la température est plus proche des 20°C (typiquement l’hiver)

Le vin va attirer les bactéries acétiques naturellement présentes dans l’air environnant. Celles-ci vont venir proliférer à la surface du vin. C’est ainsi que le vin va fermenter pour devenir du vinaigre – on parle d’acescence.

Les bactéries acétiques consomment le sucre (du vin) et rejettent de l’acide acétique. Leur présence est attestée par une membrane gélatineuse et flasque qui surnage, la mère de vinaigre. Si ça vous intrigue, cette lettre vous en dit plus sur la mère de vinaigre.

La mère de vinaigre est très délicate. Elle coule facilement si vous agitez le récipient. Or, pour transformer le vin en vinaigre, il est INDISPENSABLE que la mère de vinaigre surnage.

Après 15 à 60 jours, lorsque le processus d’acescence est terminé (c’est-à-dire qu’il n’y a plus de sucre pour nourrir les bactéries), votre vinaigre est enfin prêt !

À présent, deux choix s’offrent à vous

A ce stade, vous avez deux possibilités :

  • soutirer tout le vinaigre et arrêter la production
  • soutirer les 2/3 du vinaigre et compléter avec le même volume de vin (frais) pour amorcer une nouvelle production de vinaigre.

Selon vos goûts, vous pouvez filtrer le vinaigre soutiré pour le débarrasser de ses impuretés. Vous verrez que le vinaigre artisanal a un aspect trouble, notamment parce qu’il n’a pas été pasteurisé à haute température.

Si vous avez la moindre hésitation sur la fabrication du vinaigre, je vous invite à consulter la rubrique Vinaigre maison du site C fait maison. Vous trouverez réponse à toutes vos questions.

Vous pouvez suivre la même recette pour fabriquer votre vinaigre de cidre de pomme à partir du cidre brut. Il vous suffit de suivre les instructions ici.

Quand Orléans était la capitale mondiale du vinaigre

Maintenant que vous savez faire du vinaigre, vous serez surpris d’apprendre que cette méthode traditionnelle s’appelle la Méthode d’Orléans.

Pourquoi d’Orléans ?

Parce que, depuis le Moyen-Âge, il existait une corporation dynamique de producteurs et marchands vinaigriers dans la ville d’Orléans [3].

Ils élaboraient leur vinaigre avec autant de soin que les vignerons de Bordeaux font leur vin. Une fois l’acescence terminée, ils faisaient vieillir le vinaigre en fûts pendant des années.

Cette technique permet de produire un vinaigre de qualité exceptionnelle. D’ailleurs, le vinaigre d’Orléans était un produit de luxe [4]. Cette technique est encore utilisée aujourd’hui pour le vinaigre balsamique authentique.

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Observez le poêle qui permettait de maintenir la température ambiante et de produire du vinaigre en toutes saisons.
Source : Wikimedia

Si plus personne ne connaît le vinaigre d’Orléans, c’est parce que cette tradition vivante prit fin au 19e siècle.

Parmi les 300 maîtres vinaigriers d’Orléans, beaucoup furent contraints d’arrêter leurs activités suite à l’interdiction des corporations à la Révolution Française.

Dans les années 1830, la tradition du vinaigre d’Orléans fut étouffée par la concurrence du vinaigre allemand élaboré selon la Méthode de Schützenbach.

Aujourd’hui, il semble qu’il ne reste plus qu’un seul maître vinaigrier et moutardier d’Orléans – Martin Pouret [5].

Une méthode révolutionnaire venue de Baden Baden

En 1817, Sebastian Karl Schützenbach cherchait un moyen d’accélérer la fermentation du vin. Pour cela, il lui fallait augmenter la quantité de bactéries acétiques, et si possible, accroître l’oxygénation du tonneau.

Schützenbach eut l’idée de remplir un grand tonneau de copeaux de hêtre. Ensuite, il versa le vin par le haut du tonneau. Ainsi, le vin ruissèle doucement sur les copeaux de hêtre avant d’atteindre le fond du tonneau. Les bactéries acétiques proliférent facilement sur les copeaux de hêtre. Et l’espace vide entre les copeaux permet une oxygénation maximale.

Cette idée géniale lui permit de produire du vinaigre en 10 jours plutôt qu’en 30 jours !

Bien entendu, le vinaigre de Schützenbach n’avait pas les mêmes qualités organoleptiques (goût, odeur) qu’un vinaigre d’Orléans. Mais son prix était dérisoire.

Le vinaigre allemand était avant tout un produit accessible. C’est ainsi qu’il parvint à évincer le vinaigre d’Orléans.

Aujourd’hui, la plupart des grandes marques qui vendent un vinaigre dit « traditionnel » utilisent, en réalité, la méthode de Schützenbach… Soyez donc prudents.

Comment les antibiotiques ont révolutionné la fabrication du vinaigre

Au 20e siècle, une nouvelle technique de fermentation fut imaginée pour produire des antibiotiques à l’échelle industrielle : la fermentation par submersion [6].

Rapidement, cette technique fut adaptée à la production de vinaigre.

Voici le principe :

Le vin est d’abord placé dans une grande cuve en acier. Ensuite, on pompe de l’oxygène sous la cuve à vin. Ceci permet une prolifération impressionnante des bactéries. À tel point que le vin peut être transformé en vinaigre en 24 heures !

Cette technique dégage beaucoup de chaleur. Les cuves ont donc besoin d’être refroidies.

L’autre inconvénient, c’est que si la pompe à oxygène venait à tomber en panne, les bactéries mourraient en 30 secondes [7]. C’est pourquoi, ces installations sont équipées de générateurs électriques de secours.

Ce processus de fabrication consomme beaucoup d’énergie, mais il peut être entièrement automatisé.

Ensuite, ce vinaigre doit être chauffé à haute température (pasteurisé) pour éliminer les bactéries et autres micro-organismes. Puis, il est filtré et décanté, avant d’être mis en bouteille.

En somme, le vinaigre industriel est inerte. Il n’a plus aucun bienfait pour la santé. Il ne contient plus aucune bactérie probiotique. Et il est très franchement, sans saveur.

Son seul avantage, c’est d’être encore moins cher que les vinaigres à l’ancienne.

Je compte sur vous pour ressusciter le vinaigre d’antan

La conséquence de cette industrialisation, c’est que, même si vous êtes prêt à mettre le prix, il est difficile (voire impossible) de vous procurer du vinaigre à l’ancienne non-pasteurisé.

Les industriels ont tué le vinaigre.

Mais il ne tient qu’à vous de le ressusciter en suivant ma recette du vinaigre fait maison.

Vous ne le regretterez pas !

Bien à vous,

Eric Müller

Source : https://www.neo-nutrition.net/

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