Ce modèle profondément ancré dans notre psyché est de plus en plus mis à mal, tout simplement parce qu’il ne correspond plus aux nouveaux besoins d’expérimentation par la conscience humaine du vivant, qui ontologiquement correspond à une évolution permanente des éléments constitutifs de son réceptacle, l’univers, suivant des cycles précis. Cette inévitable révision du sens de la vie se heurte aux incompréhensions et à la farouche résistance de la plupart des moutons, tellement habitués à brouter en confiance le pâturage dans l’enclos désigné. Cette nouvelle énergie qui frappe à nos portes, extérieures comme intérieures, entraîne ainsi des déséquilibres au regard des blocages existants, des tensions, de la fatigue, de l’inquiétude. Nos sens sont déboussolés, et le corps physique en récupère naturellement tous les effets.
Le mécanisme de résistance n’est ni plus ni moins que celui mis en place par l’ego mental, tout à l’ivresse de son identité spécifique qu’il projette sous forme de jugements et d’accusations envers tout ce qui ne va pas dans le sens de ses intérêts primaires. Il en découle une agitation émotionnelle permanente, débouchant sur des sentiments mortifères : colères, peurs, haines, violences, envies… Ces mouvements brusques et saccadés expliquent la nervosité ambiante, l’irritation, l’exacerbation, les pétages de plomb vigoureux et répétitifs. La violence devient ainsi plus courante, plus brutale, plus incompréhensible, déclenchant une espèce de paranoïa sécuritaire où même le fait de sourire à un inconnu peut devenir suspect. La mécanique biologique se met tout simplement à craquer n’importe où, laissant apparaître de nouveaux symptômes et des maladies jusqu’alors inconnues. Inutile de rêver, la recherche ne trouvera rien pour les soigner, car ce n’est pas guérissable avec des médicaments, la chimie tant prisée par nos mécaniciens réparateurs existentiels. On ne peut, en effet, guérir avec des produits chimiques le manque d’amour qu’à une personne vis-à-vis d’elle-même, et a fortiori envers les autres.
Il n’y a pas d’autre possibilité que de passer à un nouveau rapport à la vie pour danser plus harmonieusement avec notre identité profonde. Il nécessite d’être plus fluide, en cessant de se faufiler dans des espaces qui apparaissent et disparaissent continuellement. Les remous intérieurs qui en découlent se répercutent forcément à l’extérieur et, comme nous ne pouvons décider pour les autres, nous sommes bien obligés de nous adapter aux autres.
Comme dans toute mutation, les premiers expérimentateurs donnent un mouvement que d’autres essaient de suivre. C’est de cette façon que fonctionne toute nouvelle mode dans notre univers consumériste. Sauf que l’enjeu n’est pas cette fois-ci notre porte-monnaie, mais notre nouveau monde d’humanité, le passage du primaire au secondaire en attendant, un jour, l’atteinte du supérieur. Ces individus engagés sont en train de prévoir dans leur domaine respectif les nouvelles façons de vivre. Ils désarçonnent la plupart du temps, tellement ils vont à l’encontre des pratiques courantes. D’autant plus que le système établi fait tout son possible pour nous rendre sourds à leur invitation. Le volume des enceintes est ainsi poussé à fond, la simple lecture éditoriale de nos médias dominants suffisant à s’en rendre compte. On y commente toujours et encore l’accessoire, dramatisé comme il se doit, et surtout pas du fondamental, ce qui se passe réellement et qui explique l’ébranlement institutionnel, d’aucuns diraient le dégagisme.
Nous préparer pour ne pas être emporté par la houle déferlante, c’est d’abord vivre la chose dedans afin qu’elle puisse se concrétiser dehors. C’est regarder sans jugement notre actuel état intérieur, et avec douceur et compassion le rendre attirant pour l’extérieur. C’est comprendre que nous attirons toujours à nous le fruit de ce que nous sommes intérieurement, et que si nous désirons paix, joie, amour, beauté, abondance, plénitude… c’est d’abord parce que nous le sommes intérieurement qu’ils se présentent à l’extérieur. Il n’y a pas de sauveur extérieur : politicien, religieux, philosophe, coach de vie, partenaire… Nous sommes le créateur à part entière du monde que nous voulons vivre. Et tant que nous en déléguons la mise en œuvre à autrui, tant que nous nous engageons dans des luttes extérieures en croyant pouvoir changer le monde, nous entretenons des illusions qui nous affaiblissent et nous maintiennent en servage.
La fluidité de la vie à laquelle nous aspirons passe par la douceur d’un cœur aimant et l’expression sans aucun complexe de ce que nous sommes profondément. En ayant le courage d’être nous-mêmes, de faire Un avec tout ce qui nous compose, nous attirons d’autres personnes en résonance et commençons alors à construire dans d’autres sphères, plus subtiles que celle de la maison de campagne avec piscine, balançoire et barbecue. Nous avons à construire ce nouveau monde en nous et pas seulement en rêve. En le vivant, nous verrons alors bientôt combien la curiosité humaine sera attirée par ce que nous recherchons, à l’image des lucioles venant sur la lumière luisant dans la nuit. Il est plus que temps de (re)devenir un soleil, d’être lumineux à l’intérieur et de laisser parler notre corps sur la route où nous voulons aller. En nous sentant dignes d’être ce que nous sommes, nous pouvons danser avec fluidité au grand jeu de la vie.
Source: Transmutatis